Arrivée depuis un peu plus de deux mois sur mon lieu de stage, je prends la mesure de la chance que j’ai : la chance de découvrir le monde de l’enseignement en n’ayant aucun diplôme en pédagogie, la chance, aussi, de vivre le quotidien dans un pays aussi différent du mien. Je suis en Bolivie, je suis volontaire, et j’apprends autant – sinon plus – que j’enseigne.
J’évolue dans un organisme communautaire, le Wiñay, situé dans un quartier en périphérie de la jolie ville de Sucre. Chaque jour je découvre de nouvelles facettes de la culture bolivienne (ou plutôt des cultures boliviennes : le pays est désigné État plurinational, on y parle plus d’une trentaine de langues!). Ici, éducation rime avec esprit de communauté, de famille.
Le Wiñay, c’est trois bâtiments et autant de maisons, avec leur personnalité propre, accueillant des dizaines d’enfants et adolescents des quartiers avoisinants. Les maisonnées sont animées : on y aperçoit des bambins de deux ans expérimenter l’art de manier le crayon, des jeunes filles et garçons énergiques répéter des danses traditionnelles et des groupes d’adolescents soulagés d’enfin boucler leur devoir de philo.
C’est le foyer de tous et chacun. Et le foyer ne dort presque jamais. On y vient cuisiner, coudre, peindre et répéter bien au-delà des heures d’ouverture. Et moi dans tout ça? J’observe, j’écoute, j’essaie d’appuyer du mieux que je peux un milieu où les arts prennent une place prépondérante, où les jeunes développent aux côtés de gens passionnés leur créativité, leur jugement, leur capacité à s’exprimer et à vivre ensemble.
Mais j’ai bien une mission plus précise, un objectif qui m’anime et me presse hors du lit le matin parce que les idées affluent et que le temps court. Cet objectif, ou le superpouvoir que je souhaite gagner, est d’instiller chez ces jeunes un goût pour la lecture. Je sais que la tâche est grande. Je travaille avec beaucoup de conviction : je repense les bibliothèques, les enjolive, les regarnis de livres attrayants et anime des ateliers favorisant la compréhension orale et écrite. Je fais ce que j’aime, espérant qu’un enfant partagera mon plaisir.
Les jeunes que je côtoie sont inspirants. Ils ont un regard neuf et intelligent sur le monde, une soif d’apprendre qui me donnent le goût de sauter à pieds joints dans toutes les aventures que la vie m’offre. À cet enfant qui me demandait, après que j’aie présenté mon atelier de tour du monde (chaque enfant se voit remettre un passeport où il consigne les pays visités en classe), si on allait « voyager pour vrai », je dis oui sans hésiter. Les livres, mon ami, les livres…
Vanessa Hebding
Un magnifique récit, à l’image de son auteure. 🙂
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