Mon temps ici en Bolivie s’achève. Il me reste deux semaines. Dix jours de travail, dix jours de partage avec la communauté du Wiñay, et dix jours pour boucler la boucle.
Je suis arrivée à Sucre, belle ville coloniale, il y a presque six mois avec beaucoup d’incertitude, mais surtout avec beaucoup d’émotion et d’enthousiasme pour ce qui m’attendait. L’art, le théâtre et la danse font partie intégrante du travail du Wiñay. On les utilise pour nourrir à la fois l’intellect et le sentiment, pour apporter un changement chez les jeunes et faire bouger la société. Et moi je suis venue appuyer ce changement à ma manière, en enseignant la danse aux jeunes de la Fundación Wiñay Intercultural. À travers de nouveaux styles de danse, j’ai tenté de provoquer de plus grands sentiments de confiance, de respect, de discipline, mais aussi de créativité et de bonheur chez les jeunes.
Et maintenant, à deux semaines de mon départ, je prends le temps de réfléchir à mon expérience et de célébrer cet accomplissement qui est mon mandat en tant que professeure de danse.
Mais comment évaluer ce travail? Comment s’assurer de son impact chez les jeunes avec lesquels on a travaillé depuis presque six mois?
Il n’y a pas d’examen pour vérifier la précision des nouveaux pas de danse appris. Pas d’échelle de 1 à 10 pour mesurer la satisfaction ni la performance.
Ça se mesure dans les petits moments entre deux actions. Mais il faut être attentif. C’est quand je vois un enfant entrer au centre en pratiquant ses pas de danse. Quand il me demande avec enthousiasme, est-ce bien ça le pas? Quand le groupe est fasciné par une vidéo de danse. C’est dans l’instant quand je vois enfin la compréhension sur leur visage. Mais c’est surtout dans les sourires éclatants, les câlins et les “Buenas tardes profe” que je reçois à tous les jours sans faute. Dans les moments d’échange informels avant et après la classe. C’est quand les jeunes s’ouvrent à moi, me racontent leur histoire.
Je n’ai peut-être pas rendu ces jeunes de futures étoiles du Ballet des Amériques ni des Grands Ballets Canadiens, mais ce n’était de toute façon pas le but. Le but c’est l’échange interpersonnel, c’est de favoriser l’expression de soi, d’inculquer une fierté chez les jeunes, de créer un sentiment d’appartenance. Et pour tout ça, j’en suis fière. Fière de moi et fière d’eux. Parce que quoi ce soit que j’aie fait, ils en font plus.
Anika Ste-Marie, stagiaire PSIJ 2018 – Wiñay, Bolivie